Apprentissage sur l’évaluation de la maturité numérique
Cette réflexion fait partie d’une série de billets sur la transformation numérique des entreprises et des organisations culturelles. Nous avons démontré précédemment qu’une stratégie numérique n’est pas une stratégie marketing. Nous avons également proposé une définition collaborative, de même qu’une vue d’ensemble du processus d’élaboration d’une stratégie numérique, en cinq étapes, que nous appliquons avec les organisations culturelles que nous accompagnons. Si les étapes 1 et 2 sont fondamentales pour bien amorcer ce processus , l’étape 3 (établir collectivement un diagnostic) est le véritable point de départ du travail. Cette étape consiste à poser un diagnostic de la maturité numérique de l’organisation. Elle permet d’analyser l’organisation avant sa transformation numérique, pour ensuite définir collectivement les zones d’intervention prioritaires. Nous présentons ici notre travail et quelques observations liées à nos récents mandats.
Mise en contexte
Précisons que nos mandats d’élaboration de stratégies numériques ont été réalisés dans le cadre de travaux associés au financement du Conseil des arts du Canada. Les clients qui ont accepté l’opération de transfert de connaissance œuvrent dans le domaine du théâtre, mais le processus proposé est applicable à d’autres types d’organisations culturelles.
Les deux éléments du diagnostic
Nous distinguons deux éléments fondamentaux pour évaluer la maturité numérique d’une organisation culturelle :
- La maturité en regard de la transformation et de la gestion du changement
C’est l’élément le plus important du diagnostic, puisque la transformation numérique d’une organisation est intimement liée à sa capacité à gérer le changement. Plus l’organisation possède de l’expérience en transformation (ex. : mise en place et expérimentation des leviers d’innovation), plus elle est outillée pour gérer le changement et plus ses parties prenantes sont mobilisées. Les chances de succès lors de la mise en œuvre de la stratégie numérique sont alors plus grandes et l’organisation peut entreprendre des projets plus complexes.
2. La maturité en regard de la technologie
Cet élément est celui qui est le plus naturellement pris en compte par les organisations lors d’un diagnostic de maturité numérique. Il vise à évaluer les compétences, les pratiques et les outils liés à l’usage de la technologie propre au bon fonctionnement de l’organisation culturelle.
La méthodologie utilisée
Un document comprenant une trentaine de questions est envoyé à une dizaine de personnes œuvrant au sein de l’organisation culturelle (équipe de travail et administrateurs). Ce questionnaire aborde uniquement l’état actuel de l’organisation (pas les transformations ou les projets).
Les questions contenues dans la première section évaluent des éléments en lien avec la transformation et la gestion du changement :
- la mobilisation des administrateurs et de l’équipe de travail;
- les habitudes de planification, de gestion et de communication;
- les pratiques en lien avec le travail collectif et l’ouverture.
La deuxième section porte sur des éléments en lien avec la technologie :
- la littératie et l’appropriation par l’équipe de travail;
- les outils de communication internes et externes;
- les outils liés à l’administration et la gestion des données;
- l’intégration des outils technologiques dans les processus de création, de production, de diffusion et de médiation culturelle.
Les données compilées permettent d’obtenir un portrait des points faibles et des points forts de l’organisation. Des entrevues individuelles sont ensuite réalisées afin de comprendre et d’approfondir certains éléments du questionnaire. Ces entretiens servent aussi à identifier quelques éléments qui pourraient constituer des priorités d’intervention.
C’est à partir de cette analyse de la maturité numérique qu’un processus d’échange est entrepris avec l’organisme afin de cerner les défis et de formuler les axes d’orientation prioritaires, qui constitueront la base de leur stratégie numérique.
Une rencontre collective de cocréation permet ensuite de partager les résultats et de s’entendre sur le portrait actuel de l’organisation. Elle permet aussi de cibler collectivement les axes d’intervention prioritaires en lien avec la gestion du changement et la transformation technologique.
Conclusion et apprentissages
Nous constatons que l’évolution d’une organisation et sa gestion du changement constituent le socle de sa transformation numérique. Certains éléments de base doivent évoluer en premier avant d’entreprendre des changements technologiques plus complexes. Les priorités d’intervention doivent être choisies en fonction de la capacité de l’organisation à gérer le changement. Il est donc préférable de cibler d’abord des projets relativement faciles à mettre en œuvre. Ils produiront des résultats à court terme et maintiendront l’équipe mobilisée. Dans le cas de l’organisme X, nous avons identifié collectivement qu’il était préférable de prioriser des actions à court terme ayant un impact direct sur l’organisation, en raison des ressources humaines et financières limitées.
Les projets de plus grande envergure ou les projets dont les résultats seront plus longs à obtenir doivent être mis en œuvre lors d’une deuxième phase, sauf si l’organisation possède déjà une forte maturité face à la transformation et la gestion du changement. Dans le cas de l’organisme X, il sera important de se pencher d’abord sur les apprentissages tirés de la réalisation de projets majeurs avant d’entreprendre de nouveaux projets.
Billet coécrit par Annie Chénier et Frédéric Vincent.
Une réponse à Apprentissage sur l’évaluation de la maturité numérique